Symphonie mineure de Guy Elese Ngilima Botuna, une perception majeure de la poétique congolaise

Poète de la génération montante, Guy Elese Ngilima Botuna fait montre des atouts qui se meuvent entre rythme et truculence, pour nous proposer une poétique originale, qui, dès le départ se débarrasse des a priori, et des convenances.

Son intonation paraît de ce fait lascive mais s’entonne avec une fulgurance qui rend son expressivité quelquefois explosive.

En effet, ses aubades gardent le même ton d’un son à l’autre, comme s’il s’agissait d’une synchronisation des percussionnistes africains .

Dépouillé des ingrédients qui donnent à la poésie sa vélocité, notamment la rime conventionnelle, cet aède de la modernité africaine s’exprime selon qu’en dit sa fertile imagination ; ce qui l’amène à passer avec une fébrilité extraordinaire d’une émotion à une autre, sans tomber dans les redites, dans les « du déjà entendu ». Pour arriver à ses fins, le barde entre les deux âges en fait au gré de son inspiration et de ses lubies .Outre le rythme, qui est permanent chez lui, il s’appuie sur le ton, qui se veut parfois interpellateur, prometteur, accusateur, selon les situations autopsiées.

On le voit dès l’entame, dans une proposition titrée « Enfant d’Afrique », où l’incantation est mêlée à l’espérance. La même fièvre se poursuit dans « Ne jamais perdre l’espoir », qu’il propose comme antidote au spleen qui secoue actuellement la jeunesse africaine en particulier, le peuple d’Afrique en général.

Il est dans la même attitude lorsqu’il annonce les couleurs en auscultant les misères des souffre-douleurs.

Ses poèmes souvent compactés nous entraînent dans de multiples vicissitudes, qui déferlent comme les spasmes d’une symphonie, qu’il qualifie lui-même de mineure, mais qui en réalité dégage un halo majeur.

Dans le lot, on trouve Promenade, Curiosité, Ce que je voudrais, Ras-le-bol, Ma grandeur, Angoisse, Non, Exaltation, Perplexe, Dépit, Sourire, Chimère, Ta beauté, Ta douceur, Ton sourire, etc.

Le déchaînement de ces états d’âme élégiaques amène le lecteur dans une extase musicale d’un genre nouveau, qui n’est pas souvent de mise dans le langage lyrique de la nouvelle génération littéraire africaine.

En effet, ses vers ne s’encombrent pas de beaucoup de spécificités formelles, pour dire sans détours leur fait à ses congénères. On peut à titre exemplatif mettre ici en exergue ce petit poème titré Absurdité :

Dix ans de prière monotone,
Qui pèsent à peine dix tonnes.
Cent ans de musique monocorde,
D’une lourdeur bien au-delà de mille tonnes.

Les offrandes ont construit bonnement
Le paradis des pasteurs,
Mais la misère règne encore dans les maisons sordides des applaudisseurs.

Toute maladie manifeste est diabolique;
On chasse les esprits maléfiques même par des appels téléphoniques.

La déraison a élu domicile dans nos
maisons appauvries, l’ignorance a fini
par nous avaler devant les yeux du monde abasourdi.

Au-delà de la posture uniforme de ses poèmes, qui se succèdent à un rythme univoque, le lecteur y trouvera une pluralité de sensations, qui donnent aux différents sermons du poète une suavité contagieuse.

Jean-Paul Brigode Ilopi Bokanga

 

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