Vumilia, la passion dans l’église, un regard sur le célibat sacerdotal ?

Par Jean-Paul Brigode Ilopi Bokanga

L’annonce de la publication par Sélène, une maison d’édition basée en Grèce, de « Vumilia, la passion dans l’église », qui a été amené aux fonts baptismaux le mercredi 15 novembre 2023, au centre Wallonie-Bruxelles de Kinshasa, a suscité beaucoup de remous dans les groupes littéraires de la capitale, voire de certaines villes de la République démocratique du Congo.

Est-ce parce que son auteur a souvent fait montre d’intransigeance dans la normalisation de l’agir littéraire, au point de se proclamer ou d’être proclamé par ses pairs « Gardien du Temple » ? Ou parce qu’il a habitué les lecteurs à savourer ses poèmes envoûtants, mêlant la satire à la morale, qui commentent l’actualité avec la sensibilité d’un homme de loi, doublée d’une rigueur classiciste qui étonne plus d’un, surtout lorsque cette virtuosité rencontre la perceptibilité.

Beaucoup s’attendait d’ailleurs à ce que l’ouvrage en question soit le produit de ses abondantes cogitations poétiques, mais la réalité a amené d’aucuns à constater qu’il s’agit plutôt d’une prestation littéraire dans le genre théâtral, où le drame est au rendez-vous. Et comme chez les Grecs anciens, ou des classiques français, la poésie en vers est omniprésente. Chassez le naturel, il revient au galop, dit-on.

C’est donc à travers un ouvrage d’une centaine de Pages, en cinq actes et plusieurs scènes, que l’auteur, connu comme le père d’Actu-poésie, a façonné son intrigue, avec comme personnages principaux Matatizo, le Curé, Vumilia, la paroissienne, Kingangu, le sacristain, avec bien entendu la participation du chœur.

L’histoire se passe dans un confessionnal, et ses abords immédiats, de la cathédrale Matembezi, située dans la ville de Béni, dans cet Est de la RDC, devenu sujet à beaucoup de controverses suspectes. Elle met en lumière les sentiments amoureux d’une paroissienne énamourée envers son curé, qui lutte entre l’amour contagieux de cette jouvencelle et les contraintes liées à son sacerdoce.

Comment Vumulia va donc communiquer à cet homme de Dieu toutes les pulsions qui secouent son cœur ? Comment ce prélat, qui semble également attentif à cette beauté juvénile en pleine puberté, un âge où la gent féminine s’autorise beaucoup de libertés, va gérer cette situation cornélienne ?

On peut alors recourir aux passages ci-dessous pour bien l’illustrer :

Vous me repoussez mon père,

Ou fuite donc vous prenez ?

A mentir vous apprenez,

Est-ce moment de le faire ?

Regardez-moi dans les yeux,

Dites-moi que je me trompe,

Et sortez d’ici en trombe,

Vous qui espérez les cieux ;

Un péché suppose fraude,

Donc un acte consciencieux

Votre amour m’est très sérieux,

Ah, vous aimer me taraude !

Être lâche c’est pécher,

Mon corps vous donne une cuite,

Devant lui vous prenez fuite,

Mais préférez-vous cacher ;

Votre corps brûle d’envie,

De, à mon hostie gouter !

Jusqu’où allez-vous douter ?

Sortez-le, donnez-lui vie (…)

Il faut reconnaître qu’en dehors des épiphénomènes comme l’idolâtrie, la pédophilie, et tous ces méfaits qui entravent la foi, dans son livre, Pat le Gourou soulève essentiellement la problématique du mariage, voire du concubinage, dans les ordres religieux d’obédience catholique latine, qui semble diviser l’opinion publique, surtout celle occidentale, trop encline de nos jours à amalgamer sur tout ce qui touche à la sexualité.

Toutefois, les différents plaidoyers faits pour changer cette donne se butent à la rigidité des prescrits de l’Eglise fondée par Saint Pierre Apôtre, qui pourtant avait lui-même été le géniteur d’une abondante progéniture. A cet effet, une encyclique du Pape Jean-Paul-Paul Il, je crois, dit clairement ceci : Les clercs sont tenus par l’obligation de garder la continence parfaite et perpétuelle à cause du Royaume des Cieux, et sont donc astreints au célibat, don particulier de Dieu par lequel les ministres sacrés peuvent s’unir plus facilement au Christ, avec un cœur sans partage, et s’adonner plus librement au service de Dieu et des hommes. » Imaginez un peu un couvent plein de prêtres mariés, avec un fatras de marmots à leurs charges, et tous les problèmes pouvant en découler ? La pagaille y installera assurément ses pénates, et la sérénité des hommes de Dieu sera mise à dure épreuve.

Et dans la situation en rapport avec l’ouvrage de Pat le Gourou, l’agression sentimentale de cette jeune croyante n’a pas su bousculer les certitudes d’un prêtre ayant fait le vœu de chasteté.

En dépit donc de son amour pour la jeune et belle personne qui s’est gracieusement offerte à lui, certaines inhibitions provenant de ses souvenirs de jeunesse vont empêcher le curé de Notre Dame Matembezi de franchir le Rubicon. Au finish, il s’était abstenu de perturber cette fille encore mineure, en l’entrainant dans des aventures sans lendemain, dont il a été lui-même victime dans sa tendre enfance.

Voilà qu’un sacristain, du nom de Kingangu, qui a suivi en cachette les aveux d’amour de deux protagonistes, et a compris la résistance du prêtre, un peu à son corps défendant, aux avances de la dulcinée, va se proposer comme une solution médiane, étant lui-même subjugué par les charmes de cette sulfureuse enfant.

Malheureusement pour lui, ses nobles intentions n’ayant point rencontrées l’assentiment de la beauté convoitée, son acharnement fut récompensé par un coup de poignard, qui va mettre un terme à ses envies ubuesques, également à sa vie. Après son forfait, prise de remords, l’assassine va expier ses péchés en enfer, en se donnant également la mort, avec le même objet contondant. Ne dit-on pas : Qui tue par l’épée périt par l’épée ?

Ce mélodrame, qui a exploré les méandres de la passion amoureuse d’une paroissienne à l’endroit d’un membre d’une Eglise où le célibat est une norme canonique, va s’achever dans cette ambiance tragique. Et quand on se réfère au prélude signé par Nzey van Musala, professeur d’écriture dramatique et de mise en scène, on est forcément obligé de reconnaître que la pièce théâtrale concoctée par Pat le Gourou séduit intensément le lecteur, de par son fond, construit avec une prouesse de funambule, et par sa forme, écrite dans une poétique charmante et éclairante.

Après avoir cerné ici les contours essentiels ayant donné du substrat à cet ouvrage mirifique, j’aime convier les lecteurs, dans leur quête du beau, du bien et du bon, à se l’approprier, pour le lire le plus rapidement possible, en vue d’appréhender correctement la problématique soulevée, dans une emphase majestueuse.

En toute foi et en toute vérité, je vous le dis, quiconque suivra cette recommandation sera agréablement surpris par les émotions que dégagent cette pièce de théâtre au titre tendancieux de « Vumilia, la passion dans l’église », mais au contenu édifiant, et à l’écriture éthérée, de par son fond judicieux, et par sa poétique éclairante.

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