La vie comme elle va, les récits d’ici et d’ailleurs : Un appel à la protection de la mémoire collective et du patrimoine commun

La publication de l’ouvrage intitulé « La vie comme elle va, les récits d’ici et d’ailleurs » aux éditions du Grand Lac, à Kinshasa, peut être considérée comme la jonction de la littérature congolaise de la première génération, avec celle de la relève, dans la mesure où elle réunit une de grandes précurseuses de la littérature congolaise féminine, et un de jeunes turcs du dire littéraire congolais, qui ont ainsi mutualisé leurs efforts, pour mettre à la disposition des amoureux des belles lettres l’œuvre littéraire dont nous avons l’insigne honneur, pour ne pas dire l’insigne bonheur, de décortiquer ici.

 

Dans un autre registre, nous savons que lorsqu’elle a travaillé comme journaliste dans différents organes de presse, notre récipiendaire s’était adonnée à la critique littéraire. On peut donc également supputer qu’avec la recension de sa dernière publication que nous publions hic et nunc, on a affaire à une « critique littéraire critiquée ».

Il s’agit bien sûr de Mme Elisabeth Mweya Tol’ande, considérée par ses pairs comme la doyenne des écrivaines congolaises encore en activité, et vivant toujours dans les limites géographiques de son pays, qui est l’auteure de ce savoureux ouvrage qu’il nous échoit de présenter ici, et de M. Sam Zola, dont on dit être l’éditeur de l’excellence, eu égard à la qualité et à la quantité des œuvres contenues dans son catalogue, qui va toujours crescendo. Comme le disent d’aucuns, les contraires se guérissent par les contraires.

 

 

 

 Une œuvre exquise 

Après une ample lecture de ce travail minutieux, nous pouvons assurer aux uns et aux autres que ce tandem de choc vient d’offrir un très beau cadeau aux amoureux des belles lettres du pays de Paul Lomami Tshibamba et d’Antoine Roger Bolamba.

Nous pouvons donc affirmer, sans crainte d’être factice, que cette grande femme des lettres, qui a été présente aux premiers vrais soubresauts de la littérature congolaise, après bien sûr les balbutiements des pionniers, et son éditeur, qui s’est incrusté très jeune dans la démarche littéraire, en tant que poète, romancier et éditorialiste, ont réussi à mettre sur le marché du livre un ouvrage remarquable, du point de vue de la forme et du fond.

 

 Publications de l’auteure 

Dès l’entame de ce livre, l’attention du lecteur est attirée sur le fait que cette brave vétérane a dans son escarcelle plusieurs ouvrages déjà publiés, dont les plus essentiels sont :

  • Remous de feuilles, poèmes, éditions du Mont Noir, 1972. Nous voudrions vraiment nous attarder un peu sur cet épisode extraordinaire, qui constitue les prémices de sa créativité littéraire. Car les éditions du Mont Noir, fondées par Père Detienne, et dirigées de main de maître par Valentin Yves Mudimbe et Georges Ngal, ont constitué le vrai déclic de la promotion des littérateurs congolais qui ont amené le dire littéraire congolais à un très haut diapason. En plus de deux précités, il y avait dans ce lot Philippe Masegabio Nzanzu, Mukala Kadima Nzuzi, Faïk Nsuji Madiya, Gaby Sumaili, Phillipe Elebe Ma Ekonzo, François Médard Mayengo, et tant d’autres. En tout cas, il est clairement établi qu’à l’époque, il fallait vraiment montrer patte blanche, pour faire partie de ce carré d’écrivains talentueux. D’ailleurs, avec l’effritement de cette maison d’édition, la littérature congolaise s’était retrouvée pendant assez longtemps dans un fâcheux cycle de silence.
  • Dans l’entretemps, la lauréate du prix Ngoso en 1966 s’était mise, de 1976 à 1997, à animer une chronique dite « Le coin des curieux », dans le journal Salongo de l’époque de gloire.
  • 22 ans après, notre héroïne va publier « Moi femme, je parle« , essai, aux éditions Grain de sel, en 1994.
  • En 1997, elle met en circulation « Ahata, suivi du Récit de la damnée », aux éditions Bobiso.
  • En 2021, elle remet en selle Ahata, suivi cette fois-ci de Ngamalo, aux éditions Nzoi.
  • En 2023, elle se fait de nouveau parler d’elle avec « Parole de Femme, expression, féminité et pensée », aux éditions Muse.
  • Toujours en 2023, Maman Betty publie « À l’épreuve du Sida, fragilité humaine et secours divin », récit-témoignage, aux éditions Mikanda.

 Gratitude et reconnaissance 

Revenons à nos moutons pour signaler aux uns et aux autres que la dédicataire de cet ouvrage n’est autre que la distinguée Première Dame de la République Démocratique du Congo, Mme DENISE NYAKERU TSHISEKEDI. Selon la dédicatrice, cette grande personnalité féminine de son pays a pu sceller la marque de son existence terrestre dans la littérature congolaise, en reconnaissant qu’elle s’y était levée tôt, bien entendu à la suite de Clémentine Faïk Nzuji Madiya.

Son projet « Congo au Féminin » a, d’après cette dédieuse, exhumé du silence les femmes qui ont apporté leur brique à l’édification de la République démocratique du Congo.

La suite de cette grande marque de gratitude est une poétique éloquente, pleine de sollicitude pour celle qui a remis les femmes congolaises au piédestal de la reconnaissance nationale. Ceux qui auront l’occasion de lire ce livre vont assurément découvrir le fatras d’enthousiasme qui émane de cette belle prouesse littéraire, digne d’un Kàsàlà, comme on le dit en Tshiluba, la langue ayant cours dans la belle famille de la personne célébrée.

Pour ne pas faire trop de mystères à ce sujet, comme nous l’avons lu quelque part, le Kàsàlà est un texte de longueur variable, généralement de forme poétique, récité pour célébrer la vie en soi, dans l’autre ou dans la nature, en vue d’exprimer la gratitude, l’admiration ou l’émerveillement. Tel que pratiqué aujourd’hui, c’est un héritage de la littérature orale africaine, ouvert à l’écriture et à d’autres apports venus d’ailleurs.

« La vie comme elle va, les récits d’ici et d’ailleurs » poursuit alors sa randonnée avec la rubrique « remerciement », qui met en exergue la gratitude de Mme Elisabeth Mweya vis-à-vis de son Dieu tout puissant, qui lui a accordé la force et le temps de produire un livre à cet âge avancé.

Les mêmes bons sentiments ont été exprimés à l’endroit de Mme Bibiane Tshefu Aningina, son amie de depuis l’université Lovanium, qui est, elle aussi, une écrivaine congolaise installée depuis 30 ans au Pays de l’oncle Sam. En effet, cette dernière lui a servi d’interface dans la rédaction de son ouvrage, sans oublier ceux qui ont bien daigné l’accompagner dans la relecture de cet excellent travail : Mme prof. Arlette MASAMUNA et M.Jacques PAKEKEBE.

La préface qui s’ensuit, est signée Prof Thierry Landu, de la faculté des lettres de l’Université de Kinshasa. Vous vous doutez bien que celle-ci augure avec emphase et dextérité les merveilles découlant du contenu du livre exploré.

 Roman ou Essai ? 

En entrant dans le vif de la nouvelle œuvre littéraire de « Maman Betty », on se demande en fait quel est le genre littéraire que postule cette auteure, dans la mesure où, ni elle-même, ni son éditeur, personne n’a daigné éclairer notre lanterne à ce sujet.  Mettons tout de suite les points sur les i et les barres sur les t, en disant, sans forcément nous faire prévaloir d’une spécialité quelconque à ce sujet, que le commun des férus de l’écriture reconnaît à la littérature cinq genres majeurs :

– le genre narratif, avec le roman, la nouvelle et le conte, comme sous-genres;

– le genre théâtral, avec le tragique, le comique, le burlesque, la farce, la tragi-comédie, le dramatique, etc, comme sous-composantes;

– le genre poétique, avec les vers traditionnels, les vers libres, le poème en prose, etc, comme sous-genres;

– le genre argumentatif, avec les discours, les essais, les encyclopédies, les articles de journaux, les chroniques, les pamphlets, etc, comme sous-composantes.

– Enfin, le genre épistolaire, qui utilise, lui, la rédaction des lettres, adressées à une personne réelle ou fictive, comme support de narration d’une histoire, ou d’expression des idées ou des émotions.

Pour le cas qui nous concerne ici, si on ne fait pas gaffe, on pourrait catégoriser l’œuvre de Mme Elisabeth Mweya Tol’ande comme faisant partie du genre narratif, notamment celui romanesque, eu égard à son style alerte et titillant, à la trame même du récit, faite de multiples rebondissements, ainsi que d’autres ingrédients qui donnent du tonus à cette classification. Mais le roman étant une narration exclusivement fictionnelle, cette œuvre qui renvoie aux faits vécus, pour exprimer les émotions de son auteure, pourrait être confondu avec le récit, tel que le suggère déjà son intitulé.

Toutefois, en tant qu’un texte qui raconte une histoire, ou un enchaînement d’événements, le récit peut se retrouver dans la fiction, comme dans la réalité. De ce fait, on le détecte dans presque tous les genres ci-haut explicités.  A notre humble avis, on fera œuvre utile en classifiant la publication ici autopsiée dans le genre argumentatif, dans le sous-genre essai, même si, à l’instar de « L’odeur du père » de V.Y. Mudimbe, elle dégage dans son cheminement une fragrance romancée, à moins que les divers spécialistes en trouvent d’autres connotations. De toutes les façons, les frontières entre les genres littéraires sont tellement subtiles qu’on a parfois difficile à les tracer.

 La retraite ou antichambre de la mort ?

Dans « La vie comme elle va, les récits d’ici et d’ailleurs », les choses sérieuses commencent avec le premier point titrée « Opuscule 1 MA RETRAITE », qui contient 7 parties essentielles. On y perçoit, à travers une conversation entre collègues de service, la nette volonté de l’auteure d’en découdre avec ceux qui pensent qu’à la septantaine accomplie, une contemporaine de Sophie Kanza, ou de Nzuzi Wa Mbombo, ne devrait plus pianoter sur l’ordinateur, un joujou qu’elle devrait céder à ses enfants, pourquoi pas à ses petits-enfants.

L’allusion faite aux deux icônes de l’émancipation de la femme congolaise, intellectuelles et femmes politiques de leurs états, alors qu’elle est leur puînée, était une façon subtile d’envoyer la concernée au placard, alors qu’elle se tient encore droite dans ses bottes, dans tous les domaines exigeant de l’énergie créatrice. Cependant, partout elle passe, Mme Elisabeth Mweya se trouve confrontée à cette réalité.

 

Tout en étant d’accord sur le principe, la question qui se pose est celle de savoir ce qu’elle va faire de cette force vitale qui émane encore d’elle, en dépit de son âge avancé et des maladies de vieillesse qui restent aux aguets, lorsqu’elle aura mis un point final à ses activités professionnelles.

Si le problème de la retraite s’imbrique d’une manière inéluctable dans son vécu quotidien, la personne devant être mise au garage lutte contre la peur de l’ennui et celle de la perte d’autonomie, lorsqu’elle aura cessé de travailler.

Ainsi va-t-il falloir trouver des recettes compensatoires pouvant l’aider à garder une vie équilibrée après 80 ans.

Mais comment y arriver dans un système de protection sociale sujet à caution ? En effet, le temps où la mise en retraite des travailleurs était célébrée avec faste par l’employeur, avec en appui des cadeaux et des pécules, étant révolu, autant pour celui où la solidarité familiale assurait une prise en charge des personnes de troisième âge, il fallait à tout prix créer des activités génératrices des revenus, pour s’assurer de quoi se mettre sous la dent.

Le paiement des allocations des fonds de pension étant devenu hypothétique, ceux qui ont commis l’imprudence d’accepter cette démarche sans au préalable recevoir les montants dus, ont vu la retraite devenir pour eux un calvaire. Pour elle, ce phénomène se prolonge même dans le secteur privé, où souvent de fâcheuses interférences dans le processus de succession font entrave à la bonne continuation de l’activité, après la disparition de l’initiateur du projet.

En poursuivant sa quête de vouloir rester active, tout en maintenant son esprit dans la joie d’être entourée par cette progéniture qui lui assure fierté et dignité, la septuagénaire voguant vers son statut d’octogénaire déborde toutefois de joie pour le bonheur d’être une mère, une grand-mère et une arrière-grand-mère comblée, dont la situation semble très proche de celle chantée dans le cantique dont voici une strophe : « À des plants d’olivier ressembleront tes fils, alentour de ta table. Les fils de tes fils tu les verras, et la gloire au Seigneur dans les siècles. »

Pour elle, le temps est un allié qui offre, même à une personne âgée, la perspective de s’asseoir chaque matin sur une chaise longue pour lire ou écrire, en savourant les bienfaits du repos. Mais la gestion du temps étant un défi permanent, comme avec « A la recherche du temps perdu » de Marcel Proust, Mme Elisabeth Mweya observe la fuite du temps avec une certaine angoisse, pour finalement décréter qu’ici-bas, tout semble précaire, et les générations présentes, et celles futures ! »

Heureusement que pour son cas, il y a son organisation d’animation à l’entreprenariat et à la culture d’autopromotion, son école maternelle et primaire, sa concession fermière, ainsi que ses diverses occupations culturelles et littéraires, qui peuvent colmater la brèche. Cependant, rendre ces initiatives socialement bancables et pérennes, afin qu’elles ne fassent pas banqueroute, tel est son grand souci.

Selon Maman Betty, rien n’est gagné d’avance dans ce pays où demain est un illustre inconnu. Comme pour illustrer sa pensée, elle a fait allusion à un congé qu’elle a réclamé à cor et à cri, pour avoir le temps de se consacrer avec beaucoup plus d’entrain à moult projets mis en jachère, notamment ceux littéraires. Pensant alors trouver la quiétude dans sa ferme au plateau de Bateke, où elle pouvait se réveiller à l’aube pour entrer en conciliabule avec son laptop, ainsi que sa muse, les deux complices qui lui permettraient de continuer à écrire, grâce à la proximité avec la brousse qui la mettrait en contact intime avec la flore et la faune.

Malheureusement pour elle, ce projet bienséant n’a pas été à la hauteur des espérances suscitées, la nature ayant eu ses propres projections. En effet, les conditions de vie et les moyens de transport difficiles au Plateau de Bateke avaient grièvement porté atteinte à son équilibre pathologique, l’obligeant ainsi à rebrousser chemin. Mais avec les intrusions familiales, voire amicales, intempestives auxquelles elle devrait faire face en tant qu’ainée et personne-ressource de sa grande famille, ce congé voulu au départ paradisiaque était finalement devenu une sorte de chemin de croix.

 Liberté ou mise en liberté provisoire ?

Il s’avère qu’en sus de ce premier point, l’on se gave avec plaisir avec la lecture de « l’opuscule 2 titré MA VIE ET MA LIBERTÉ », étalé en 4 points, qui relatent avec frénésie les sinuosités des temps de liberté que l’auteure voulait consacrer à un travail utile, mais qu’elle devrait parfois sacrifier pour écouter les bavardages des parents et amis souvent en difficulté financière, dont elle devrait, à son corps défendant, prêter oreille. Mais que faire ? sinon accepter avec résignation cette fatalité, en se rappelant les conseils de sa génitrice, qui lui disait souvent : la vie est une sorte de likelemba : lelo ya yo, lobi ya moninga ! (La vie est une sorte de tontine, aujourd’hui, c’est pour toi, demain, ça sera le tour de l’autre)

Se rappelant également d’une de ses amies sociologue, qui avait prédit qu’après les pillages intervenus en 1991-92, seulement 20 % de la population active aura à prendre en charge 80 % de la population désœuvrée, elle a volontiers attribué cette indigence collective, qui oblige d’aucuns à toujours tendre la main pour survivre, à la mauvaise gestion institutionnalisée de la chose publique. Jadis, la chose publique était sacrée et on attendait le mûrissement des efforts collectifs pour en cueillir les fruits. Actuellement, le bien commun est détrôné de son piédestal, tout comme le sacré est profané. La fringale du pouvoir, de la richesse, de la jouissance des plaisirs de la vie a envahi les cœurs des hommes au point que la personne humaine a tendance à se vautrer dans les antivaleurs. Au nom de la liberté, qui n’est en réalité que du libertinage, celles-ci ne font plus sourciller. L’effort est honni, et l’abnégation a perdu ses lettres de noblesse, atteste l’auteure de cet ouvrage.

L’opuscule 3, titré « L’EFFERVESSENCE DE MA RUE », nous renseigne qu’une grande partie de ce point est consacrée à la recherche d’une biographie, celle de l’auteure, qui pense à bon escient qu’il faille elle-même la raconter dans un livre, faute d’être sûre de la retrouver un jour dans un musée. Mais dans sa rue animée, on entend les appels des débrouillards, qui proposent divers négoces, notamment des acheteurs des mapapas, et des bibendes, des cireurs, des changeurs de devises usagées, des vendeurs de charcuterie, des vendeuses de légumes, de pains, des coopérants, etc. Pour elle, la rue est de nos jours devenue un lieu de transactions et d’échanges féconds. Mais comme ce fut le cas pour une ses nièces qui vendait les « Evida », on se rend aussitôt compte que ces activités précaires de survie ne résistent aucunement aux boutades de l’adversité. En effet, cette fille battante, qui vadrouillait dans les rues de Kinshasa en quête d’une solution à ses problèmes quotidiens, était venue lui demander un secours financier, son capital s’étant volatilisé lorsqu’elle a été bousculée par un traumatisme pathologique. Que faire dans un pays où il n’y a pas de couverture sanitaire pour la majorité de ses habitants, mais où la minorité occupant les postes institutionnels ou œuvrant dans un secteur privé de plus en plus opaque, sautait dans le premier aéronef disponible pour aller se faire soigner à l’étranger, bien entendu aux frais de la république (NDLR).

En tout cas, cette résilience des habitants de Kinshasa lui a donné des motifs de ne pas sombrer dans l’abattement.

Mais sa rue, qui n’était pas que lieu de négoce, était aussi celui de rassemblement pour divers motifs, à travers notamment les prestations des parlementaires debout, des fournisseurs des services, des picoleurs dans des bistrots de fortune, des commissionnaires immobiliers opérant sous les arbres, des coopérants de tout genre, etc.

Cette rue porte dorénavant les stigmates des universitaires et des diplômés post-secondaire devenus des vendeurs de cartes-crédits, des gestionnaires des cabines téléphoniques, des chayeurs et des changeurs de monnaie, des quados, des membres des ligues des jeunes des partis politiques alors que d’autres ont déjà dépassé la quarantaine. Cette engeance organise du matin au soir des débats qui commencent par la politique, et qui se terminent par le foot, ou mieux, par le paris de football, en passant par la musique, sans omettre la religion, la mode, bref, qui finissent par semer à tout vent divers ragots. Le soir, cette rue devenait alors le royaume de ces filles de joie qui offraient leurs services sulfureux aux hommes en manque de chaleur féminine, et celui des kuluneurs et autres malfrats, qui y opéraient à ciel ouvert, sans crainte des représailles.

Abordons maintenant l’Opuscule 4 titré MON QUARTIER ET MA RIVIÈRE, avec son premier sous point intitulé « Le morceau de maïs tombé dans un puits », dans lequel l’auteure se rappelle de sa tendre enfance, avec des baignades dans la rivière Kalamu, au moment où ce cours d’eau tumultueux était encore propre et profond, et non cette masse d’eau polluée devenue une incroyable décharge publique. Fini donc des battements d’eau qui concurrençaient le rythme du tam-tam, orchestrés par de jeunes filles qui s’amusaient à couper le souffle.

Ainsi frustré par une population mesquine qui a squatté ses rivages et son lit, qu’on ne cure même plus, ce patrimoine aquatique de la ville de Kinshasa est devenu rétif à sa spoliation, et ses fréquents débordements rappellent aux riverains qu’ils ont eu tort de le tourmenter.

On passe alors au deuxième sous-point titré ‘PLAIDOIRIE POUR MA RIVIERE, dans lequel l’auteure fait un plaidoyer pour redonner à la rivière Kalamu son aplomb d’antan. C’est là une façon pour elle d’appeler à la sauvegarde et à la protection de l’environnement de la ville-province de Kinshasa, qui se dégrade de plus en plus, avec ses multiples avenues boueuses devenues des lacs et des marécages infranchissables,  un vrai calvaire pour les motocyclistes et les automobilistes -, ainsi que ses rivières et autres cours d’eau remplis d’immondices.

A travers le troisième sous-points titré « L’EXISTENCE, UN ESPACE À NEGOCIER NECESSAIREMENT ENTRE L’HOMME ET LA NATURE », Elisabeth Mweya continue sa quête de remodelage responsable du milieu ambiant, pour que l’homme puisse cesser d’être le destructeur de son habitacle, ainsi que le prédateur de sa faune et de sa flore.

 

En fin de compte 

Grande est notre tentation de continuer le décryptage de cet ouvrage que nous avons lu avec une certaine avidité, pourquoi pas fébrilité, mais nous préférons nous en tenir-là, pour permettre aux lecteurs de découvrir par eux-mêmes les différentes approches que suggère le contenu de cette merveilleuse production littéraire de Maman Betty, qui nous amène, avec sa verve habituelle, à cerner notre mal-vivre quotidien, ainsi que les motifs de notre actuel mal-être, en vue de réguler la société vers un vivre ensemble harmonieux.

Il est évident qu’en dehors de tout ce qui a été ébauché ci-dessus, on peut encore lire dans cet ouvrage l’Opuscule 5 titré « LE RETOUR DE LA PLUIE », l’Opuscule 6 intitulé, lui, « L’ARBRE DE SINALCO », l’Opuscule 7 qui a pour titre « LES RÉCITS DE LA VILLE D’AKRON », avec ses cinq sous-points, dont le premier est titré « Une rencontre singulière »; le deuxième est intitulé « Les chants de cygne de Silver Lake; le troisième a pour titre « Les amish et refus du modernisme »; le quatrième, avec comme intitulé « Le complexe commercial GRAIN DE SENEVE », et enfin, le cinquième, qui est tout simplement titré « Une leçon apprise : préservons la mémoire collective ! »

Et pour vous assurer que nous ne vous avons pas raconté des salamalecs, nous mettons ci-après ce commentaire succinct de José Mabita Ma Motingiya, qui sert de POSTFACE à l’ouvrage, qui s’extasie devant la splendeur de la dernière publication de «Maman Betty» en ces termes :

« Magnifique et émouvant récit, un précieux livre de mémoire. Et si le temps nous emporte au loin, et bien souvent vers l’oubli, sa captation à travers des mots et des moments magiques, immortalise des traces de génies ou simplement des tranches de vie, grandes ou petites, qui émeuvent ou qui inspirent, pour la postérité. Je vois des petits enfants qui écoutent leur grand-père, (dans le cas d’espèce leur grand-mère) leur dire et leur lire, l’orgueil de leurs ancêtres, de ceux et celles qui les ont précédés. »

Ainsi dit, la seule recommandation qui nous reste à faire est celle de demander aux différents lecteurs, toutes générations confondues, de jeter leur dévolu sur cet essai, qui se lit comme un roman, dans lequel «Maman Betty» explore et éclaire avec panache des situations qu’on vit, ou qu’on a vécues, dont on parle, ou on a déjà entendu parler, voire celles qu’on découvre pour la première fois, mais qu’on a parfois du mal à correctement appréhender.

 Jean-Paul Brigode ILOPI Bokanga

 

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