

Il est à la fois écrivain, poète et traducteur français résidant en Allemagne. Hervé Richard a accepté volontiers de répondre aux questions de La Plume vivante.
Dans une première vie, j’étais enseignant ; dans une seconde j’étais et je suis traducteur ; ma troisième vie a commencé avec la poésie. C’est celle que je préfère.
2. Pouvez-vous nous parler de la genèse de votre pulsion d’écriture ?
J’ai toujours écrit, mais c’était toujours une activité à côté. En 2011, j’étais en soins intensifs et j’ai prié le Ciel : Si je sors d’ici, j’écris. Depuis, j’écris. Je n’écris pas pour être lu, j’écris pour être libre.
Je crois profondément que le véritable changement vient de l’intérieur, que ce qui nous sauve est à l’intérieur de nous. Voilà maintenant plus de dix ans que je pratique le reiki et la méditation. J’y ai découvert la respiration et le recentrement.
L’écriture dans sa simplicité – une feuille de papier et un stylo – nous renvoie à la simplicité des choses. Néanmoins, à l’instar du langage, cette simplicité cache une extrême complexité. J’aime cette magnifique phrase de Heidegger : « Le langage est la maison de l’Être ». Sur ce point, je suis totalement en accord avec lui.
La question du rapport entre Écriture/ Poésie et Action traverse toute la littérature. Mallarmé disait : « Je ne sais pas d’autre bombe qu’un livre ». On pense aussi à Victor Hugo et à son combat contre la misère et contre la peine de mort, à Émile Zola et à son article « J’accuse…! » écrit au cours de l’affaire Dreyfus. D’autres écrivains et poètes sont plus discrets, et face à l’urgence de l’action, l’écriture peut effectivement paraître « dérisoirement insuffisante ». Mais parce qu’il tente, cherche, découvre, parce qu’il ose, appose, propose, parce qu’il ne se satisfait pas du monde tel qu’il est, le poète est irrémédiablement et incorrigiblement révolutionnaire.
On ne peut pas effacer. On peut dépasser, sublimer, transcender, mais les blessures demeurent. Elles se calment, mais elles demeurent.
Le capitalisme est en bout de course et nous conduit droit au mur. Les inégalités se font toujours plus criantes, la pauvreté plus grande, les catastrophes écologiques plus menaçantes. Il est temps pour l’être humain de découvrir une autre manière de vivre ensemble (l’espagnol dit si justement « convivencia ») qui ne soit fondée ni sur le gain, ni sur le profit, ni sur l’intérêt personnel, ni sur la propriété privée.
Être libre, c’est d’abord ne plus craindre le regard ni le jugement des autres. Être libre, c’est faire de son histoire une force, c’est faire d’un destin subi un destin choisi.
L’écriture sauve. L’écriture est à la fois mur, digue, pont et passage.
Un processus d’autoguérison et de survie, un exercice, et un plaisir.
Propos recueillis par Fiston Loombe Iwoku